
Cette note est née d’une coïncidence dont seuls les internets ont le secret : une conversation avec Jérémie sur le cinéma suivie d’un tweet de Fibre Tigre.
Avant l’avènement de la vidéo, le cinéma a longtemps été un format solitaire. Les films ne pouvaient être projetés que dans des salles spéciales. Rares étaient les particuliers qui avaient du matériel de projection à domicile. Les films n’étaient donc écrits que pour être vus dans des contextes bien définis.
Le développement des techniques de diffusion et d’enregistrement ont alimenté la mutation du cinéma au 20e siècle. La télédiffusion a donné une seconde vie aux films tandis que la petite lucarne enfantait ses propres formats : téléfilms, émissions de variété, programmes live. Le magnétoscope a introduit l’enregistrement dans les foyers et la VoD a parachevé la logique de linéarité des contenus (c’est le moment de relire Benjamin).
Chacune de ces innovations ont modifié le statut initial du cinéma, le faisant passer d’un produit fermé à un produit ouvert. Aujourd’hui, un film c’est :
- En amont : des annonces de casting, des fuites, des acteurs/réalisateurs qui tweetent, des trailers, des road shows d’avant-premières, des tonnes d’interviews, des pré-ventes…
- Pendant : des opérations marketing à l’entrée des salles, parfois dans les salles, des animations, de la communication sur le box-office…
- Après : la sortie en VoD, puis en DVD, les diffusions sur les chaines, payantes, puis gratuites, puis les rediffusions, les bonus DVD, les versions uncut, les prequels, les sequels, les 25 remises de prix, les resorties en salle, le merchandising, les ARG, les jeux vidéo, le transmedia (qui commence même parfois avant la sortie du film)…
Attention : chaque film ne bénéficie pas d’un traitement de luxe. Le cinéma étant un produit comme les autres, les productions bénéficient de moyens de promotion adaptés à leurs ambitions : les blockbusters en grandes pompes, les petits films de manière plus discrète.
Pourtant, malgré un siècle d’innovation et de création de valeur périphérique, les films sont encore majoritairement produits pour être vus une fois. Les occasions de revoir un film confirment ce constat : les niveaux de lecture complémentaires, les easter eggs ou les découvertes sont rares.
Que déduire de ces observations pour les marques?
Comme les films au cinéma, il y a deux grandes catégories de produits/services. Ceux qu’on va voir le vendredi soir un peu crevé et ceux qu’on attend, qu’on voit au cinéma, puis en VoD, puis en blu-ray et dont on achète les figurines.
Pour un produit comme pour un film, la qualité est un pré-requis indispensable mais n’est qu’un point de départ pour créer de la valeur périphérique avant, pendant et après. Si les succès ne s’expliquent pas par l’armada marketing, cette dernière saura en cas de succès tirer le meilleur de vos productions.
Le marketing est un moyen, jamais une fin.